20 novembre 2013

Temps de lecture : 3 min

Le Forum d’Avignon : « La crise économique mondiale sera terrassée par la culture ! »

Son verbe est aussi bon que son trait ! Jean Plantu, le dessinateur de presse du quotidien Le Monde livre sa vision de la culture, loin d’être caricaturale, avant sa prise de parole au Forum d’Avignon !

De son vrai nom Jean Plantureux, l’artiste est surtout reconnu pour son talent de caricaturiste et son habileté à résumer l’information toujours de manière drôle et intelligente. Présent au Forum d’Avignon: le pouvoir de la culture ,  (du 21 au 23/11 programme ci-dessous), en tant que modérateur, il livre dans nos colonnes sa vision sur l’influence de la culture et son implication positive dans nos sociétés… Il sera aussi modérateur d’une session du Forum d’Avignon pendant l’évènement avec comme thème : la culture, facteur de paix ?

1. Quelle est votre définition de la culture ?

Plantu : Une fois qu’on a dit que « la culture, c’est ce qui reste quand on a tout oublié », on pense avoir échappé à la question. Mais, en tant que dessinateur, il m’arrive de rencontrer des parents affolés parce que leur enfant souhaite se lancer dans le dessin de presse. Je ne décourage jamais les vocations ; d’abord, je calme les parents et j’ajoute en m’adressant au jeune qu’il ne pourra jamais rien créé s’il n’a pas au départ une bonne base de culture générale. Quand j’ai commencé à travailler au journal Le Monde, je n’avais pas grand-chose comme culture générale et cela a été longtemps (même maintenant) un handicap. Heureusement, les journalistes m’ont donné des « cours de rattrapage ». Aujourd’hui, je peux dire que Le Monde c’est un peu ma culture.

2. Croyez-vous au(x) pouvoir(s) de la culture ? Votre exemple le plus marquant ?

Plantu : C’est la culture qui tire les citoyens vers le haut. Les débats qui quelquefois n’ont pas lieu à cause des interdits, des tabous, de la censure ont lieu finalement grâce à la culture. À l’époque du mur de Berlin beaucoup de créateurs ont utilisé la culture pour passer des messages interdits.

3. Ce pouvoir influence-t-il votre quotidien, votre façon de travailler ou de créer ?

Plantu : Sans le savoir, je ne pense qu’à ça. Toute création de dessin est une manière de raconter son époque. Selon les jours, les dessins sont plus ou moins réussis. Cela dit, ils permettent de créer des débats qui n’auraient peut-être pas eu lieu sans les images. On peut être bousculé ou énervé par un film et puis, à la réflexion, on s’aperçoit qu’il a suscité des débats qui échappent à tous; même aux créateurs et c’est très bien ainsi. Le formatage actuel qui s’impose un peu partout empêche le dérapage ; Les dessinateurs de presse revendiquent le droit au dérapage.

4. Quelle initiative proposez-vous pour donner du pouvoir à la culture ?

Plantu : Harceler les responsables politiques pour qu’ils donnent plus de moyens à la culture. Il n’y a pas si longtemps, dans cette magnifique ville d’Avignon, une responsable politique avait promis que si son candidat emportait l’élection présidentielle, le budget du théâtre serait augmenté de 30%… Cela dit, il faut être convaincant, trouver les bons arguments et prouver que l’on a une grille de lecture qui permette de faire avancer les idées. La crise économique mondiale sera terrassée par la culture.

La montée de l’islamophobie et l’antisémitisme sont des sujets inquiétants. En réunissant des dessinateurs palestiniens et israéliens dans des endroits sensibles permet tout simplement de calmer les choses. Plus on aura des rencontres sur ces sujets sensibles et plus nous arriverons à faire baisser l’intolérance quotidienne. Comment ? En montrant des dessins qui dérangent : du coup, les doigts se lèvent et après quelques noms d’oiseaux lancés ici ou là, on se dirige vers l’essentiel : le débat. Mais pour créer des débats, il faut des moyens.

Déranger, ça ne coûte pas si cher. Ce qui coûte le plus cher c’est d’avoir le courage de lancer des idées qui ne vont pas dans le sens du formatage ambiant ; Montrez des dessins sur les mutilations sexuelles que subissent les femmes en Égypte, en Somalie ou même en France (!!!), vous obtiendrez des réflexions citoyennes qui permettent à tous de progresser. La culture, c’est le progrès.

Propos recueillis par l’équipe éditoriale du Forum D’avignon

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